Notre langue dit bien, « Dans les petits pots, les meilleurs onguents. » Dans le cas d’Irène, il s’agit d’une femme tranquille, silencieuse et effacée. Elle semblait vouloir disparaître non seulement aux yeux des autres, mais à ses propres yeux. Ce qu’elle faisait n’était jamais assez bon pour elle. Par contre, elle s’activait sans bruit avec la ténacité d’une abeille.
« Vierge imprimez en moi votre pureté sainte…
Irène est née dans le canton de Springer, c’est-à-dire à quelques kilomètres des limites de la ville de Sturgeon Falls (Ontario). Son père, Alphonse, était mécanicien au moulin à bois de Cache Bay et sa mère, Imelda Allaire, s’occupait de la famille. Celle-ci ne chômait pas avec onze enfants, 6 filles et 5 garçons dont Irène était la deuxième. Cela en dit long sur son sens de responsabilité inculqué en tant qu’une des aînées. Elle va à l’école Saint-Joseph jusqu’à la 8e année, où elle est impliquée dans les mouvements jeunesse : croisade, Jeunesse indépendante catholique, Enfant de Marie. La famille ne pouvant payer la scolarité au Pensionnat Notre-Dame de Lourdes, Irène due fréquenter le « High School » public de Sturgeon Falls qui ne donnait alors que 40 minutes de français par jour. Durant son enfance, Irène a connu une tante Fille de la Sagesse, Sr Marie-Céline de St-Pierre, venue visiter la famille. Aussi, comme adolescente, elle travaillait quelques semaines à l’hôpital de Sturgeon durant les vacances ce qui lui donnait encore un contact avec les sœurs. À 17 ans, elle fait son École Normale à l’Université d’Ottawa, puis enseigne deux ans à l’école Saint-Joseph avant d’entrer au postulat en août 1944.
… votre recueillement et votre humilité…
Ainsi, Irène eut le temps de bien réfléchir, de mûrir sa vocation et de connaître les Filles de la Sagesse. Son but en entrant au postulat était « mieux connaître, aimer et servir Jésus, sa Mère et la Trinité. » Dès sa profession en 1946, avec zèle, elle reprend l’enseignement, d’abord quelques mois à Ottawa, puis au Sault Ste -Marie pour les classes primaires. En 1955, la communauté du village de Field profite de son engagement à l’école jusqu’en 1959. L’implication en paroisse la voit s’occuper aussi de la sacristie : préparation de la messe, lavage de coupes et nombreux linges… etc. Attentive et méticuleuse, Irène se fait un plaisir de rendre ce service caché et silencieux. En 1964, Blind River l’accueille pour les cours de 9e et 10e année à l’école Sainte-Marie. Puis en 1965, retour à Ottawa pour enseigner à l’École Cadieux puis à l’École secondaire Belcourt, de la 9e à la 13e année, jusqu’en 1976. Elle intègre alors la communauté de Résidence II du Chemin Montréal. Les différents niveaux scolaires ne semblent pas être une difficulté, tant son zèle inné pour l’enseignement se déploie aisément.
… afin que tout mon être en conserve l’empreinte…
Cette sœur assidue à la tâche, appliquée avec un sens du devoir remarquable, semble avoir une autre flèche dans son carquois. On lui demande d’aider Sr Camilla Campbell à l’économat à 430, Chemin Montréal tout en demeurant dans la Résidence II. Assidûment, toujours diligente, elle exécute ce service avec exactitude et persévérance sans épargner temps, dévouement et travail. Une vraie mission! Tout était fidèlement accompli avec cœur et sans bruit. Et que dire de ses talents artistiques? Habituée à décorer des salles de classe, et des affiches de toutes sortes, très habile à manier le ciseau, que ne fit-elle pas dans la grande maison pour décorer les tableaux de fêtes des Sœurs ou autres? Comme elle aime beaucoup faire plaisir, elle s’ingénie de bien des manières à faciliter la vie des autres.
… Mère, allumez en moi votre admirable zèle…
En 1986, Sr Irène prend l’été pour aller à la Maison Mère vivre « Les pas de Montfort », pour ensuite revenir à sa tâche d’aide-économe à sa Résidence jusqu’en 1992. Après une période de repos où elle se dévoue dans divers services, elle se rend au Centre intercommunautaire Quatre saisons à Saint-Élie-d’Orford (Québec) pour deux années de ressourcement. À partir de 1995, elle déploie un autre talent qui lui convenait très bien. Jusqu’en 2003, les Archives de la Province lui permettent de déployer son sens de la recherche, d’organisation et de techniques de classement. Sa communauté reste la même, mais s’appelle dorénavant le Pavillon Sagesse. Le dévouement de Sr Irène et sa générosité étaient sans bornes dans tout ce qu’elle entreprenait par amour du Seigneur et des autres. Plusieurs années de services cachés et silencieux à l’interne l’amènent doucement en 2018 au stage de reposante.
… et que l’on pense à Dieu, lorsque j’aurai passé…
Dans la patience et la persévérance, Sr Irène attend son Seigneur. Elle a toujours été discrète, prenant le moins de place possible, et ne se voyant pas à la hauteur de ses capacités. Au seuil du dernier soupir, elle répétait doucement, « Je veux la Sagesse… » L’Amour éternel a sûrement éclaté de lumière et de joie en la prenant sur Son cœur, restaurant valeur et grandeur à Ses yeux.
Sr Lise LeRiche, fdls