Certaines s’exclameraient : « 93 ans de vie! Quelle chance! » Sr Odile a eu cette chance. Une vie pleinement vécue! Une vie comblée, heureuse et accomplie. Le père de Sr Odile, Dorius Archambault est arrivé à Smoky Falls (devenu Crystal Falls) non loin de Sturgeon Falls (Ontario), pour y ouvrir une toute première école où il devait commencer sa carrière d’enseignant. Il s’y installe et fonde une famille avec Irène Rivet. C’est là qu’Odile est née, l’aînée de cinq enfants. Elle n’a que 10 ans, quand elle perd sa mère et, un peu moins d’un an après, son père. À quel âge apprend-on à se laisser aller en totale confiance dans les bras d’un autre?
« Donnez et l’on vous donnera… (Luc, 6, 38)
Pouvons-nous imaginer que Marie soit celle vers qui le cœur d’Odile se tourne? Il est bon de noter que Celle-ci est venue la chercher sur terre le jour de l’Annonciation, le 25 mars 2021! Entrée au postulat à Ottawa, en juillet 1944, Odile fait profession, le 2 février 1946, suivie de l’École normale dès septembre. Après quelques mois d’enseignement à l’école Saint-Joseph de Sturgeon Falls, elle enseigne au Pensionnat Notre-Dame de Lourdes de cette même ville, jusqu’en août 1961.
… c’est une bonne mesure, tassée, secouée, débordante…
À ce moment, elle fait ses vœux définitifs et se rend à la Maison-Mère en France, pour une formation spirituelle appelée le « Troisième an » à l’époque. De retour au pays, elle reprend sa tâche comme enseignante et supérieure au Pensionnat de Sturgeon jusqu’en 1969. Avec la venue des écoles secondaires françaises dans le système scolaire public, Sr Odile devient enseignante au cours commercial (secrétariat) à l’école secondaire Algonquin de North Bay tout en faisant partie de la communauté des Filles de la Sagesse d’Astorville où elle est nommée supérieure. Elle devient spécialiste en comptabilité et spécialiste en « secretarial guidance. » Elle est loin de se douter que les plans de la Sagesse pour elle feront basculer sa vie.
… qu’on versera dans votre sein,
En 1983, Sr Odile est choisie pour devenir la Secrétaire générale. À cette époque, il s’agit d’un rôle clé auprès de la Supérieure générale. Odile, en tant que secrétaire, fait alors partie du Conseil général, et doit diriger le secrétariat de la Maison générale à Rome. Sr Odile était donc sur place prêtant main-forte à la nouvelle édition de la Règle de Vie des Filles de la Sagesse en 1985. Que de copies et recopies, révisions, changements de mots, peaufinage de textes! Elle s’y donne à plein, et fait le travail confié dans un esprit de service et en toute discrétion. Son doigté, son tact et son esprit d’humour en font une collaboratrice de choix. Ses multiples tâches sont bien détaillées dans la Règle de Vie 1985. Elle doit envoyer aux intéressées, sœurs et autres, les décisions prises par le Conseil, garder la correspondance officielle à date, prendre en charge classeurs et archives, écrire les procès-verbaux des réunions de Conseil… etc. Une longue liste de tâches qu’elle exécute allègrement… sans trop de stress! Ces actions lui donnent une vision interne de l’ensemble de la Congrégation. Elle se sent alors vibrer au diapason de l’univers lors de rassemblements internationaux et lorsqu’elle accompagne le Conseil général lors des visites des Sœurs dans les différents pays.
… car de la mesure dont vous mesurez
Ce grand défi devient, pour Odile, une passion. Les défis journaliers sont occasions de dépassements. À Rome, elle est une perle rare : amabilité, compétence, oubli de soi, collaboration, habileté en plusieurs langues, participation à des rencontres intermontfortaines, visites au Vatican. Elle aime tout : les liens internationaux, être proche des grandes causes de l’Église, du Vatican, de la vie religieuse et de la Congrégation. S’accumulent les rencontres des formatrices, des Provinciales, des économes, des Conseils de Congrégation, des Chapitres généraux. Son cœur s’élargit et elle est partie prenante de tout, dans un esprit d’appartenance toujours grandissant. Aimer à l’universel, quoi de mieux, « c’est un enrichissement que rien n’égale », « J’ai aimé tout de la Ville éternelle, » dit-elle. Elle pourrait chanter comme Édith Piaf, « Non, je ne regrette rien! » Elle avait trouvé une autre famille.
… on mesurera pour vous en retour
Sr Odile mène ce train jusqu’en 2001, incluant un bref congé au Canada. Quoi de plus naturel qu’elle retourne à son cher Astorville pour plusieurs mois à son retour définitif au Canada? En septembre 2001, elle intègre la Maison Accueil-Sagesse où elle s’engage activement dans les archives de la Province jusqu’en 2007 pour ensuite se dévouer comme chauffeur, réceptionniste, et rendre des services en liturgie et traductions à l’occasion, tout en devenant membre de l’équipe de leadership de cette résidence.
Après une retraite bien méritée, le Pavillon Accueil la reçoit jusqu’au jour, où le Seigneur lui fait signe de ramasser son tablier, car il vient. C’est lucide et en paix qu’elle l’attend jusqu’au bout, à la seconde près, en ce jour béni de sa Mère, Marie, jour de son annonciation. Elle avoue quelques instants avant de mourir, d’entrer dans les noces éternelles.
Lise LeRiche fdls